L’île

4ème de couverture: A l’occasion d’une naissance fictive où le hasard a sa place et où la réalité se tisse d’imaginaire et de rêveries, un homme relève le défi d’inventer sa vie. Mais à peine commencée celle-ci va basculer. Flavian, pris au piège, se donne quelques jours et l’espace d’un roman pour se construire. Croisant des souvenirs anciens et des événements actuels il nous invite, tout au long du texte qui s’écrit, à être témoin de son existence incertaine. Les questions de filiation et les rapports avec les femmes, teintés de ruptures, prendront alors au fil des pages goût de sable et de sel, dont on recueillera la fleur jusqu’au bout du récit.

Commentaires: Pour continuer sur ma lancée des effets de l’écriture, et notamment de l’écriture de vie, je me suis mise au défi de ce dont je me croyais le plus incapable : l’écriture fictive et imaginative, celle de la nouvelle ou pire, du roman. J’avais constaté avec De femme à femme… (cf. plus haut) ce dont l’écriture était capable dans ses liens avec la vie : mais dans une telle démarche ma plume restait bridée par un factuel qui la précédait et qu’elle avait décidé de respecter au plus près. L’essentiel était déjà tracé, il s’agissait de respecter des traces d’un passage réel, en proposant simplement (grâce aux mots mis) une chair disparue autour de squelettes encore bien présents. Mais partir de rien, fors un brin d’encre au bout des doigts et soi-même, quelque part… ? Seul un pari un peu fou, et encore, pouvait relever l’impossible défi. Ce fut un coup de dés qui décréta du personnage et de la situation de départ, seule partie du roman à être « vraie ». Une fois l’être créé, l’écriture se chargea de la suite qui déboucha, sous forme d’un projet de « nouvelle », sur ce qui devint le dernier chapitre : « Et si c’est par la fin que l’histoire commençait ? ». Et alors, l’envie d’en savoir plus sur Flavian naissant m’incita à placer ce début à la fin, le coup de dé au début, avec la curiosité de se demander comment le personnage, sans doute pas si neuf que cela, allait se débrouiller pour dérouler l’espace d’un roman entre ces extrémités ainsi délimitées. Et il y arrive pas si mal, piochant dans des souvenirs plus ou moins proches dans le temps, personnels mais surtout largement professionnels (c’est plus facile, et la besace d’un ex-psychologue est largement alimentée !), en les détournant à sa façon, c’est-à-dire en les transformant tellement qu’un détective y perdrait tous ses indices. Non, ce qui s’expose là est le produit d’une écriture, sans lien direct ici avec la vie privée, laquelle n’est qu’une de ses sources parmi d’autres. Et c’est possible ! A expérimenter cela, outre le plaisir manifeste de l’écriture, j’ai remarqué qu’une fois en vie sur le papier, notre créature prend vite son autonomie et que son auteur même n’en fait pas à sa guise avec elle. Elle se rebiffe et ne se laisse pas mener par le bout de la plume. Essayer de la piéger, pour voir, ne change pas grand chose à l’affaire : n’a pas le dernier mot qui l’on croit.

Réaction d’un lecteur: « Merci de m’avoir donné l’occasion et le plaisir d’entrer dans l’univers d’un narrateur inattendu. Il ne manque pas de questionner et d’interpeller le lecteur quelque peu sensible à l’écoute du « roman de vie ». Bravo pour l’engagement et les astuces littéraires. »

Réaction d’un écrivain, Philippe Forest : « Je ne peux qu’écrire à quel point votre projet littéraire charme par son caractère insolite, toujours ouvert et permettant au texte de progresser par surprises et en dehors des cadres habituels du récit».

Réaction d’un collègue, Jean-Louis Le Moigne: « En lisant ton livre je voyais la gravure d’Escher, « la main qui dessine la main qui dessine la main… » et je pensais aussi qu’elle ne me disait pas la poésie de l’île et du golfe, le héros qui crée le narrateur qui crée le héros. »

Réaction d’une doctorante, Elisabeth Heutte: « Je finis et quitte à l’instant l’île, je ne l’ai pas dévoré, je l’ai savouré. D’un samedi à l’autre mes réactions ont évolué. Samedi dernier je le découvrais, sa structure m’étonnait, m’était étrangère et progressivement, j’ai été apprivoisée, happée sans être captive. Est-ce un conte, un roman ? Je ne sais et n’ai aucune envie de le classer. Tu mélanges les genres passant du poétique à l’intrigue. J’ai été tenue en haleine par le jeu de la complexité qui démarre avec le sort tiré du coup de dé et qui semble se transformer tout à tour en jeu de piste, jeu de l’oie pile ou face pour déjouer les déductions, emboîter des surprises faisant naître un réel possible non prévu et éphémère, des détours inattendus. Lire le paragraphe central de la page 65 suffit pour s’en rendre compte ; mais aussi pages 72 et 73, en trois paragraphes vous serez témoins d’une tragédie… Tout au long de la lecture il faut découvrir sur quel pied les yeux vont danser pour suivre les méandres de la pensée, de l’imagination. Peu importe si le lecteur s’égare avec Flavian le héros balbutiant, il vit lui aussi le suspens d’une histoire de vie qui s’invente en se découvrant des filiations, des traditions, des transmissions de patrimoine et de métier, de choix des prénoms. Avec des jeux de mots créant le fil des événements, s’imbrique une réflexion sur l’acte d’écrire, l’émergence du non prévu et le jaillissement de la vie avant qu’elle ne soit pensée.

Réaction d’un écrivain-chercheur, Anne-Claire Déré: « A la croisée de la longue nouvelle, du roman court et de l’hymne aux paysages marins de la Bretagne sud, le livre de Martine Lani-Bayle laisse un goût de sel à l’âme de ceux qui l’ont lu, évocateur tout à la fois de livres vacances, de dur labeur, d’épices et de brûlure. La trame du voyage auquel elle nous convie peut paraître étrange. Flavian, son héros, n’est pas un « personnage en quête d’auteur », mais un personnage en quête d’histoire. Comme il le dit lui-même dès les premières lignes du roman, il est « enfant du hasard, né de la rencontre d’un dé et d’une pensée ». Héritière lointaine du jeu du cadavre exquis cher aux surréalistes, l’auteur compose son livre à partir de quatre « ingrédients » que lui ont attribué quatre coups de dé : « un homme adulte, la mer, en vacances, en proie au désir ». Cependant, au lieu de prendre la plume pour se plier à ces règles, Martine Lani-Bayle a préféré la tendre au personnage qu’on venait de lui donner, et lui demander d’écrire lui-même son histoire de vie. Car, curieusement, cet homme, né du néant, a des souvenirs, pénibles pour la plupart, issus d’une longue suite d’échecs et de ruptures, mais emprunts d’une profonde sensualité où le sable et la mer contribuent à la montée du désir. Construire sa vie, même pour un personnage fictif, est une expérience douloureuse, une mise au monde de soi-même pour laquelle s’avère indispensable l’aide de la signataire du roman qui, par des propos tantôt encourageants, tantôt apaisants, tenus en alternance avec des questions d’auditeurs avides de connaître la suite, conduit cet accouchement psychanalytique au fil des pages. Jusqu’au moment où, surgissant à l’insu du narrateur-personnage fictif et de l’auteur-guide, Sylvie interrompt le dialogue. Naïade des marais salants guérandais, cette fille du sel n’a pas, elle, d’histoire à se construire. Sa vie est au contraire toute tracée avec un passé pesant et un avenir bien terne, verrouillé par un engagement. C’est pour y échapper qu’elle s’est jetée en travers de l’édifice vital que Flavian était laborieusement en train de dessiner. Avec la complicité d’Yves son ombre jumelle, cette voleuse de bonheur se glisse dans la vie du héros, comme un trait de soleil ; moderne Antigone, avant de s’immoler à l’enlisement inexorable du sel, elle cherche avidement une grotte, un cairn, une île isolée, comme une enclave dans une vie toute faite, un instant de partage total, de confidence, d’échanges et d’amour, loin de tout, hors de la trame du roman lui-même, avant de la tisser de son propre désir. Une aventure de quelques nuits ineffaçables, semblables au bouquet de fleurs blanches sur un fond tourmenté de rocs, de mer, de nuages et de vents bretons qu’Adélaïde Lani a dessiné en première page de couverture, et que nous laissons aux lecteurs la joie de découvrir. »

L’île
roman, Bucdom éditions 2000.
149 pages, 16,77 Euros

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lani.bayle@gmail.com

L’ile Martine Lani-Bayle

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